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20 août 2010

Week-end à Varsovie

N'importe quel buveur zigzaguant dans le quartier de Praga, à Varsovie, vous dira que le bâtiment en briques rouges, sis aux numéros 27 à 31 de la rue Zabrowska, abrite la distillerie de vodka Koneser. C'est vrai, mais incomplet. Ce site industriel datant de la fin du XIXe siècle est aussi, depuis peu, le siège d'une galerie de photos cachée dans un recoin. Praga la malfamée, Praga l'ouvrière s'encanaille avec des artistes.

Praga fait face à la vieille ville de Varsovie, sur l'autre rive de la Vistule dont les flots sauvages coupent la capitale de la Pologne en deux. Praga est l'antithèse du centre dit historique reconstruit sur les ruines laissées par les nazis. Déambulant dans Praga, on imagine la Varsovie d'avant. La rue Zabrowska, par exemple, son café Pinguin au rez-de-chaussée d'une maison basse si typique d'Europe centrale, ses trottoirs ombragés l'été par des platanes, sa voie pavée tranchée en son milieu par les voies des tramways rouge et jaune.

C'est à Praga que l'Armée rouge était stationnée à la fin du conflit et observa, l'arme au pied, l'écrasement du soulèvement de Varsovie par les Allemands. Puis ce furent les années de l'industrialisation à marche forcée, durant lesquelles les ouvriers se rapprochèrent des artisans établis dans ce quartier.

Ensuite la liberté, chèrement payée par les laissés-pour-compte de la transition, ce lot de désoeuvrés, de chômeurs et d'alcooliques qui errent dans Praga. Ce marché russe, sans doute l'un des plus grands bazars d'Europe, établi dans un stade désaffecté, offrant des produits de seconde zone le plus souvent en provenance d'Asie. La mauvaise réputation du quartier n'est pas totalement surfaite. "C'est notre triangle des Bermudes. Parce que les voitures et les gens y disparaissent sans explication !", rigole Roman Wozniak, professeur de sculpture à l'Institut des beaux-arts de Varsovie et directeur du théâtre d'avant-garde Academia.

Il est l'un des artisans de la renaissance du quartier grâce au "festival (annuel) des voisins" qu'il a créé. Depuis trois ans, chaque mois de juillet, il fait sortir l'art dans la rue et découvrir des endroits insoupçonnés dans cette capitale a priori rébarbative, où les buildings construits pendant le boom économique des années 1990 ou la grisaille des immeubles socialistes écrasent ce qui reste d'authentique. Les premiers à réagir ont été les artistes attirés à Praga par le volume de certains sites et le prix du mètre carré, inférieur de moitié à la moyenne de la capitale.

Les guides touristiques qui déconseillaient encore récemment de s'aventurer la nuit dans le coin doivent se remettre au goût du jour. Aujourd'hui, personne ne peut ignorer la Fabrika Trzciny, ses 2000 m2 d'anciens abattoirs reconvertis en galerie, bar, salle de défilés et bientôt restaurant, par un très entreprenant producteur de musique. Une brise s'est levée, pas encore un raz-de-marée, mais "Praga devient à la mode", pour le plus grand bonheur de Roman Wozniak.

Christophe Châtelot

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